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Histoire du soldat – La stampa

ARTS-SCÈNES GENÈVE - «C’est un rire peut-être moins pur et enfantin qui dut retentir chez certains spectateurs bien pensants lors de la création de l‘Histoire du soldat. Tentons d’imaginer la stupéfaction des auditeurs de la première, en septembre 1918 au Théâtre Municipal de Lausanne. Si la langue de Ramuz pouvait être relativement familière à certains, il en allait tout autrement de la musique de Strawinsky. Ce ne sont pas les quelques œuvres que le public suisse romand avait pu entendre à Montreux en 1914 puis à Genève grâce à Ernest Ansermet ou sous la direction du compositeur qui purent former l’oreille des mélomanes à ce langage si novateur. Le sujet abordé dut également troubler plus d’un spectateur. En cette cinquième année de la Grande Guerre, traiter d’un déserteur dont la conduite n’a rien de bien honorable, voilà qui contraste avec les grands spectacles patriotiques qui se montaient alors. Cette incompréhension est confirmée à la lecture de la majorité des critiques parues alors. Pourtant, cette Histoire véhicule une force et une cohérence qui se révèlera petit à petit à un public de plus en plus large.

Reste la surprenante rencontre de ces deux créateurs. Il y a pourtant des liens intimes entre le propos du poète et celui du musicien. Si l’élégant compositeur de St Petersbourg se retrouve prisonnier de notre petit pays en raison de la guerre et surtout de la révolution bolchevique, il mettra à profit ce calme relatif pour poursuivre son travail. Il œuvre essentiellement à la partition de Noces qu’il ne terminera qu’en 1923. Le chemin parcouru entre le Sacre du printemps et ce dernier ballet ne peut se concevoir sans notre Histoire du soldat. De son côté, Ramuz, avec Adieu à beaucoup de personnages et autres morceaux, réalise une sorte de bilan du chemin parcouru et jette les bases d’une nouvelle poétique. La réunification de ce monde morcelé va devenir sa préoccupation majeure. On voit à quel point ce souci est sensible dans le traitement du conte d’Afanassiev qui sert de point de départ à l’Histoire du soldat. Constituée d’une succession de lectures et de scènes jouées, en une alternance sur laquelle le poète travailla longuement, le texte renvoie directement au formidable kaléidoscope musical que nous propose le compositeur.» (Philippe Girard)

 
 
 

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